Le poète Miguel Hernández (1910-1942), qui a subi la guerre civile espagnole, était « le poète du peuple ». Son poème Il arriva avec trois blessures, qu’on ne cesse de répéter et chanter, peut être considéré comme l’icône de ce poète décédé à 31 ans en prison.
 Il arriva avec trois blessures :
celle de l’amour,
celle de la mort,
celle de la vie.
 Avec trois blessures il vient :
celle de la vie,
celle de l’amour,
celle de la mort.
 Avec trois blessures, moi :
celle de la vie,
celle de la mort,
celle de l’amour.1
 Miguel Hernández a été emprisonné de septembre à  novembre 1940 dans la prison de Palencia. Puis, comme auparavant, il continuera à faire ce qu’il appelait son «tourisme pénitentiaire».
 Aujourd’hui, le traumatisme Miguel Hernandez persiste encore. La prison de Palencia, panoptique inclus, a été réhabilitée en centre civique. Mais toute une série de facteurs a fait que celui-ci laisse place à un musée d’archives de police, ce qui a réveillé à nouveau les blessures. La mémoire, les vers, de Miguel Hernández restent parmi nous ; et la prison de jouet où il a passé deux mois, accueillera des poètes et des surveillants en traumatique oxymore.
 Ceux qui ont réhabilité la prison ont respecté la mémoire de Bentham, mais pas celle de Miguel Hernández. Le traumatisme continue, et c’est-à-nous de rappeler que le pire surgit et resurgit toujours. Entre temps, les vers du « poète du peuple » évoquent le travail des analystes dans leurs efforts quotidiens pour aborder le traumatisme et panser les blessures. Comme le dit si bien le poète, dans les derniers vers d’Élégie en souvenir de son grand ami Ramon Sijé :
 Vers les âmes ailées des roses,
vers l’amandier de crème je te réclame,
cars nous devons parler de tant de choses,
compagnon de mon âme, compagnon.2

 Traduit de l’espagnol par Juan Vicente Carrillo


1          Hernandez M., « Il est arrivé avec trois blessures »  in Mon sang est un chemin.Vevey : Editions Xena, 2010, p. 107.
2              Hernandez M., « Élégie» in Mon sang est un chemin. Vevey : Editions Xena, 2010, p. 113.